Bonjour à tous.
El Salvador
Le 10 décembre 2024

Réjean LachanceCasa de Retiros “La Sagrada Familia”
Le 3 décembre 2024

Bonjour à tous!

Il me fait plaisir de prendre quelques instants pour vous donner quelques nouvelles depuis mon retour du Québec.

En premier, je veux vous dire que j’ai passé trois mois au Québec et j’ai engraissé d’une vingtaine de livres mais, aujourd’hui, après un peu plus d’un mois de mon arrivée ici, je recommence à retrouver ma ligne. Au Québec, j’avoue que j’ai profité de notre bonne nourriture et de nos très bons desserts. En plus, partout où je suis allé que ce soit dans ma famille ou ailleurs, j’ai été traité comme un roi.

Au Québec on m’a opéré des cataractes dans les deux yeux et, actuellement, tout va très bien. Je vois beaucoup mieux de loin. Ce n’est pas une opération qui est douloureuse, au contraire, c’est très facile, il faut seulement être fidèle aux gouttes qu’on doit mettre 4 fois par jour, et tout va bien.

Une chose à laquelle j’ai pensé: Marie disait: «Dites le chapelet en famille pour avoir la paix et être unie comme famille.» Je me rappelle qu’à la maison, on récitait toujours le chapelet en famille quand on était petit et, aujourd’hui, je remercie Marie parce que nous sommes une famille unie. C’est le fun, quand je vais au Québec, on se réunie quelques fois et on est bien ensemble, et cela est très important. Tout le monde essaie de m’aider et j’essaie de faire la même chose et on est bien ensemble.

Ici, à la Maison de Retraite, je vais dans un village deux fois par semaine pour célébrer la messe. L’autre jour, je suis allé à El Socorro, il y avait au moins 50 personnes dans l’église et seulement une personne a communié. Je suis allé à Los Planes, il y avait plus de 100 personnes, j’ai confessé une seule personne, et seulement une quinzaine de personnes ont communié. Je ne comprends pas. Avant, quand j’allais à Los Planes, je devais confesser pendant trois heures avant la messe et parfois il me manquait du temps. Mais j’insistais beaucoup pour que les gens se confessent à tous les mois.

Vous savez, je suis maintenant très content de ne plus être curé, parce qu’il y a certaines choses que je n’accepte pas depuis cette année. Par exemple, les enfants ne pourront plus communier avant l’âge de douze ans, pour moi, cela est injuste. On dit que le Corps du Christ est le Pain Vivant qui nous donne la force pour être fidèle jusqu’au bout, pourquoi est-ce qu’on le refuse aux enfants. L’an dernier à Las Mercedes j’ai donné la communion à une douzaine d’enfants entre 8 et 10 ans. Le gouvernement a donné à chaque enfant une tablette. Sur les douze, il y en avait 6 qui voient de la pornographie et les enfants savent que ce n’est pas correct. S’ils se confessent seulement à l’âge de 12 ans, ils ne pourront plus s’en sortir, à moins d’une grâce spéciale bien sûr, et s’ils le veulent bien.

A El Socorro, un monsieur qui a toujours été catéchiste et bien centré dans sa foi, veut maintenant se marier. Il est dans la quarantaine. Maintenant le curé exige qu’il reçoive lui et sa future épouse 25 formations, une fois par semaine. Il vit très loin de l’église et celle qui lui donnera le cours vit aussi très loin, environ deux heures de marche dans la montagne. Pour moi, cela est injuste. Un jeune voulait se confesser, le curé lui a dit qu’il devait écrire tous ses péchés et lui donner la feuille quand il viendrait. Il n’y est jamais allé. Depuis que je suis ici, je me rends compte que les prêtres ne confessent presque plus. Moins le prêtre confesse, plus il arrive à perdre le sens de son sacerdoce. L’an dernier, un jeune qui est lecteur voulait se confesser, le curé lui a dit «non». Le jeune lui a dit que s’il ne voulait pas le confesser, il ne serait plus lecteur, alors le curé à accepter.

L’an dernier, quand j’ai demandé à l’évêque si je pouvais demeurer à la maison de retraite, il ne voulait pas trop. Il m’a offert d’aller dans le presbytère de la Cathédrale qui est tout neuf, et célébrer la messe à la cathédrale, etc… Je lui ai dit que cela ne m’intéressait pas et il m’a demandé pourquoi. Je lui ai dit qu’à la Cathédrale, tout le monde parle dans l’église et que je ne pourrais pas l’accepter. Quand nous avons une messe à la Cathédrale, la plupart des prêtres ont leur téléphone, écrivent des messages ou passent leur temps à parler entre eux. Avant et après la communion, les prêtres entre eux parlent et rient. Alors, je me dis que quelques prêtres ont perdu le sens de l’Eucharistie. Donc, comme ce n’est pas si important, ils défendent aux enfants de communier avant l’âge de 12 ans. C’est maintenant la loi dans tout le diocèse. Les gens ont perdu la dévotion à Marie Auxiliatrice. Ils ont oublié tout ce qu’Elle a fait pour ce village et pour eux. Ils sont de plus en plus matérialiste, ce qui fait que, peu à peu, leur argent est devenu un petit dieu. En plus, les cellulaires sont peu à peu, sans que les gens s’en rendent compte, devenus aussi un petit dieu.

Je pense souvent quand j’étais curé à Citalá, on faisait beaucoup d’activités, les gens venaient, on faisait des jeux, comme le jeu de poches, aux quilles etc… Les gens s’amusaient, riaient et cela les rendait heureux. Je me disais que j’allais demander au curé de me donner un samedi par mois pour revivre cela. Je lui ai demandé et il m’a dit «NON.»

En plus, je voulais cette année célébrer aussi la neuvaine de Marie Auxiliatrice du 15 au 24 mai. Il m’a dit que je pouvais la célébrer mais ne pas inviter les gens des villages. Je lui ai dit que c’est sûr que j’allais la célébrer. Même si je suis tout seul, si les gens viennent, ce ne sera pas moi qui les inviterai. En voulant une journée par mois, en voulant célébrer la fête de Marie Auxiliatrice, je me disais que cela allait rendre les gens plus heureux et que ce serait une façon d’aider le curé. Je me rends compte que, à cause de cela, pour les autres prêtres, en réalité, je ne fais rien.

Cette semaine, je demandais à Marie Auxiliatrice quelle était ma mission ici, c’est quoi le projet de Dieu, pourquoi Dieu a voulu que je sois ici. Et j’ai compris: ma mission, c’est d’être ici et recevoir les gens, que ce centre va être un lieu de pèlerinage où les gens pourront venir se confesser, se refaire spirituellement et je serais seulement l’accompagnateur. Mais je me disais: je ne peux rien faire, le curé n'est pas d’accord. Je me suis dit que j’allais obéir au curé et que le projet ne se fera pas dans la désobéissance. Je me suis rappelé de Don Bosco. Son grand ami qui est devenu le cardinal de Turin en Italie. Un jour, il a défendu a Don Bosco de confesser et dire la messe pour les jeunes parce que quelqu’un avait écrit quelque chose de mal de lui et il pensait que c’était Don Bosco. Même le Pape a demandé à Don bosco d’obéir au cardinal. Quelques mois plus tard, la vérité fut découverte et le Pape a accepté la communauté de Don Bosco qui est devenus la communauté Salésienne. Don Bosco a dit à tout le monde présent que cela est le fruit de l’obéissance. Dieu n’a jamais commencé une œuvre sans la souffrance et l’obéissance. Je vais obéir et si Dieu veut cela, ça deviendra une réalité.

Mais ici, tout n’est pas noir. Je suis même mieux traité que je l’étais à Las Mercedes. Quand je suis revenu du Québec, le curé m’a payé les trois mois de vacances. Il n’était pas obligé. Dernièrement, mon auto a brisé et le curé m'a donné $100.00, en plus, il va me donner $50.00 par mois pour les dépenses de gaz. Je n’aurais jamais reçu cela à Las Mercedes. Tout cela est un cadeau de la Providence. J’ai une maman qui s’appelle «Marie Auxiliatrice» elle m’aime et je l’aime.

En fin de semaine, j’ai reçu 5 personnes du vendredi au dimanche. Ce sont deux familles que je connais bien depuis mon arrivée au El Salvador, il y a 30 ans. Avec eux, j’ai célébré la messe tous les jours et on est allé à la chapelle Marie Auxiliatrice pour prier le chapelet. On a fait des jeux, on a joué au tock, aux dés, etc… Les gens me disaient: on est tellement bien ici, on oublie tous nos problèmes. Ils ont tous voulu se confesser. Voilà, c’est ça, la mission de la Maison de Retraite. Quand les gens se sentent bien, ils peuvent prier.

Ici au El Salvador, ce n’est pas la coutume de faire des jeux, etc…À Las Mercedes, j’ai invité le Nonce Apostolique, nous l’avons invité dans la salle de jeux, j’ai fait faire une lasagne et j’ai acheté une bouteille de vin puisqu’il est Italien. À un moment donné, il m’a appelé et m’a dit: «Padre, ce que tu as fait ici est très important. Tous Ces jeux enlèvent le stress des gens et les rendent meilleurs. » J’étais content d’entendre cela.

Vous savez ici la situation au Salvador ne s’améliore pas du tout. Une des personnes qui est venue me visiter, vit aux États-Unis. Elle a deux enfants qui demeurent au Salvador et qui sont en prison, arrêtés injustement. Un des deux venait de finir de travailler et il a pris quelques bières. Ils étaient dans la maison. Les policiers sont arrivés et ont demandé aux jeunes d’aller au poste de police avec eux. Ils sont allés et ils les ont arrêtés parce que certaines personnes ne l’aimaient pas. Ils ont dénoncé un des jeunes comme s’il était membre d’une gang. L’autre, le plus jeune, avait une amie de Citalá. Comme elle voulait l’abandonner pour un autre, elle a dit à la police qu’elle avait été violée. Un des policiers savait que ce n’était pas vrai. Les autres policiers devant la mère, lui ont mis les menottes et l’ont maltraité. Les deux sont maintenant en prison depuis presque deux ans. La maman a pris un avocat et a donné près de 5000.00$ parce que l’avocat disait qu’il allait les libérer mais il n’a rien fait.

Elle doit à chaque mois donner 150.00$ pour chacun, ce qui fait trois cents dollars et elle doit donner 100.00$ à celui qui va porter l’argent à la porte de la prison. La mère ne sait pas si ses enfants reçoivent quelque chose, elle ne sait pas s’ils sont vivants. Elle me contait cela et elle pleurait. Je lui disais ce que la Vierge Marie avait dit à une sainte: Quand une mère pleure pour ses enfants, Marie recueille ses larmes et les présente à Jésus. Je lui disais que Marie pleure avec elle, elle n’est pas indifférente à ses souffrances, ce sont les injustices des hommes qui font le mal.

Vous savez, des fois moi aussi, je n’en peux plus. C’est comme si j’entendais les pleurs de ces gens. J’aimerais pouvoir faire quelque chose pour arrêter ces souffrances à cause de l’injustice. Vous savez quand cette dame me contait tout cela, je l’écoutais et je souffrais avec elle, c’est ça ma mission à la Maison de Retraite: écouter les gens, les comprendre et souffrir avec eux. Pourquoi elle ne va pas raconter tout cela au curé. C’est que, parfois, les gens ne se sentent pas accueillis et doivent prendre un rendez-vous mais ils devraient faire le premier pas. Parfois nous jugeons pour rien, nous nous imaginons des choses pour rien en pensant que l’autre ne comprendrait pas. Je demande souvent au Seigneur de donner à l’Église un autre Monseigneur Roméro qui sera capable de dénoncer toutes ces injustices.

Vous savez, assez souvent, il y a des jeunes que j’ai connus quand j’étais à Citalá et qui me téléphone des États-Unis pour me demander des prières et pour se vider le cœur. Plus nous nous approchons du pauvre, de celui qui souffre, plus nous nous approchons de Jésus. Cet après-midi, je suis allé à El Hornito pour célébrer la messe. Je disais aux gens que durant ce temps des Fêtes combien de pères et mères de familles pleurent. Ils aimeraient voir leur enfant qui est en en prison, au moins seulement savoir s’il est vivant.

La semaine passée, un jeune est décédé en prison. Ils ont remis le jeune à ses parents dans la tombe fermée en leur défendant d’ouvrir la tombe. Le père a décidé de l’ouvrir, le jeune n’avait plus de yeux. Un autre était coupé en morceaux. Comme les parents ne peuvent pas avoir de contact avec leur enfant, ils vivent dans l’inquiétude à savoir si leur enfant est vivant ou non. On peut s’imaginer la souffrance des parents et aussi des enfants qui ont leurs parents en prison accusés injustement.

Je disais aux gens que, quand nous venons à la messe, nous devons apporter avec nous toutes les souffrances des gens et les mettre sur la patène pour que le prêtre les présente au Père. Nous ne pouvons pas être indifférents aux souffrances du monde.

Ici, il y a quelque chose qui me fait mal. La Maison de Retraite est un peu à l’abandon, le gazon est très long. On manque d’eau et il serait presque impossible de recevoir des groupes pour une retraite. Je pense que l’année prochaine quand je vais aller au Québec, je vais revenir par Boston. Tous les gens de Citalá s’en vont toujours à Boston, j’ai demandé à quelqu’un de parler au curé d’une paroisse de Boston, pour voir si je pouvais célébrer une messe et il y aurait une quête pour la maison de retraite. On pourrait faire creuser un puits artésien et faire de la propagande pour que la Maison de Retraite soit un lieu de repos, de prière. Quand les gens viennent ici, ils disent qu’ils sentent la présence de Marie Auxiliatrice.

Tout le mois de décembre et janvier, il fait froid ici. Cette semaine la température a baissé à 12º. En janvier, ma sœur Marina, Denis et son épouse Diane vont venir ici pour trois semaines. Je vais acheter une chaufferette et mettre de l’eau chaude pour la douche, parce que sinon, ils ne pourront pas profiter de leur séjour. Quand je suis parti de cette paroisse, il y avait 12 chambres de bain qui n’avait pas de portes. Rien n’a été fait après mon départ. Alors, la semaine dernière, j’en ai posé deux dans les chambres où dormiront ma famille.

Je termine cette lettre en vous souhaitant de passer un beau Noël rempli de joie. N’oubliez pas ceux qui souffrent. Je pense spécialement à la Palestine où les gens meurent inutilement. Je pense à ceux qui ont été arrêtés injustement ici au El Salvador. Ils sont environ 20,000 personnes. J’imagine que la plupart vont pleurer durant la nuit de Noël. Plusieurs papa et maman vont pleurer durant cette nuit de Noël. Vous voulez passer un beau Noël, priez pour ces gens-là. Faites des sacrifices pour eux, pour qu’ils sentent la main de notre Maman du Ciel qui leur imposera les mains.

Je vous souhaite aussi une heureuse et sainte année 2025. Je vous bénis de tout cœur au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen.

Réjean ptre


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